Consultations et désillusions

Aux douze coups de minuit lors du passage du 26 au 27 novembre, j’ai répondu à 3 des 6 questions proposées pour la préparation des Assises sur la sécurité. Cette nouvelle consultation, après celle sur le stade Bauer, me parait un outil insuffisant pour pouvoir apporter des éléments aux experts qui sont censés les analyser pour ou lors des prochaines Assises qui se tiendront le 12 décembre, semble-t-il. 

La consultation avance sous couvert, de propositions qui sont toutes acceptables (augmentation des effectifs de police, service d’aide à la parentalité, activités municipales en pied d’immeubles….) et auxquelles on ne peut que souscrire. D’ailleurs, le nouveau maire a lui-même participé aux majorités municipales de 1995 à 2014 qui ne proposaient pas autre chose. D’autres propositions n’ont aucun intérêt car on connait déjà la réponse majoritaire (satisfaction de la diversité des commerces, souhait d’espaces végétalisés autour des résidences….). Certaines formulations peuvent même être incompréhensibles (vos suggestions pour faire de Saint-Ouen une ville qui anticipe et qui répare).

Mais revenons au fond du sujet : la sécurité dans notre ville est un problème qui a des conséquences néfastes sur le quotidien de nombreux audoniens depuis quelques décennies. Elles sont liées essentiellement aux trafics de drogues qui se sont installés à ciel ouvert dans une quinzaine de « spots » qui drainent des millions d’euros.  Quel paradoxe vis à vis des habitants, souvent modestes, qui vivent autour, souvent dans le logement social ! Ces trafics impliquent de nombreux jeunes, même très jeunes …, et son éradication pourrait durer de longues années encore et concerner plusieurs générations, c’est dire la difficulté de la tâche !

La nouvelle municipalité rappelle au début de cette consultation ses premières mesures en réponse à l’insécurité qui sont d’ailleurs dans la continuité de la mandature précédente… :

  • 25 policiers supplémentaires
  • La multiplication par 6 des policiers municipaux pour arriver à 30
  • La poursuite du développement de la vidéoprotection

et décline toute une série de mesures à venir dans le champ de la « prévention ».

Pour ma part, j’ai tendance à penser que ces 3 mesures ne changeront rien aux trafics qui se déplaceront si nécessaires car le fonctionnement de cette économie parallèle est aujourd’hui très structuré et rapporte tellement d’argent que les bénéficiaires ne sont pas prêts de s’arrêter ! Le think tank Terra Nova a publié le 9 octobre dernier une étude :  Cannabis : pour une autre stratégie policière et pénal qui montre notamment le caractère vain des contrôles répétés tout comme les enquêtes et interpellations menées dans le cadre des affaires de stupéfiants qui n’aboutissent jamais. C’est une politique d’encadrement de la consommation du cannabis, une réelle politique de prévention et de diminution de la précarité qui empêchera, peut-être, des jeunes de tomber dans cette délinquance. Les jeunes qui y échappent sont souvent dans des familles où la parole et le fonctionnement sont structurants, je miserais donc tout sur l’aide à la parentalité pour traiter le problème au niveau municipal.

Sur la suite de cette consultation, on nous précise : « Cette consultation sous forme de questionnaires permet de recueillir l’opinion, les avis, les retours d’expérience et de terrain des Audoniennes et des Audoniens afin de travailler en groupe restreint représentatifs de la société civile à des pistes de réponses le jour des ateliers, en présence de spécialistes sur chacune des thématiques. » Si les Assises qui nous sont proposées peuvent avoir un intérêt, leur programmation me semble plus une réaction aux évènements tragiques de l’été dernier, qu’un temps où tous les acteurs de terrain concernés pourraient se rencontrer pour donner leur diagnostic de la situation et commencer à élaborer des réponses adaptées et inscrites dans la durée.

Il aurait fallu, par exemple, en plus de cette consultation et avant les Assises, permettre à tous les acteurs volontaires d’échanger sur leurs propres analyses de la situation entre pairs :  habitant.e.s par quartier, gardien.ne.s d’immeuble et bailleurs, équipes pédagogiques des écoles et établissement scolaires et parents d’élèves, médecins de ville et des centres de santé, policier.e.s municipaux et nationaux, professionnels de la justice, acteurs des services sociaux et associatifs….Chaque groupe cité aurait établi un rapport présenté ensuite en Assises par leurs représentants respectifs aux partenaires institutionnels.

Parallèlement, un groupe de travail issu de divers champs d’activités (social, éducatif, justice, médiation, santé, insertion, prévention…) devrait travailler sur la prévention des conduites à risques chez les jeunes. Une mission métropolitaine a publié des documents et peut aider la mise en place d’une démarche locale : https://mmpcr.fr/

Il serait nécessaire bien sûr, dans le cadre de la démocratie locale d’avoir un nouveau débat autour de la dépénalisation du cannabis. Même si le PS local en avait organisé un à Mains d’œuvres en présence de Karim Bouamrane , Daniel Vaillant (ancien maire du 18ème) et Le Député Bruno Le Roux. Les mentalités évoluent et des élus dont le maire LR de Reims, sont prêts à tester la légalisation du cannabis récréatif dans leur ville. Nous pourrions donc débattre de cette expérimentation possible à Saint-Ouen.

Le conseil municipal extraordinaire du 14 octobre a été comme je le craignais, une série d’interventions plus ou moins intéressantes où rien de nouveau n’a été dit, seulement rappelé. Chaque élu de la majorité a tenté en quelques phrases d’énoncer quelques points du programme pour sa délégation et s’est appliqué à dire les éléments de langage, chers à cette majorité : Nous avons comme objectif d’extraire toute une génération de la délinquance en mettant l’excellence à la portée de toutes et tous, en permettant la réussite là où l’on vit quelle que soit l’origine sociale, géographique, culturelle ou familiale. Car accéder à l’excellence, c’est être l’architecte de sa vie.

Je crains encore que les ateliers des Assises dont nous ne connaissons ni le contenu, ni les participants (!) soient encore peu productifs car peu préparés. La démocratie locale annoncée doit devenir transversale, s’inscrire dans un temps long et cesser toute verticalité pour que la participation citoyenne soit réelle et efficace.

Dominique GARCIA

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4 réflexions sur « Consultations et désillusions »

  1. On dirait que La consultation est à géométrie variable puisque j’ai reçu fort tard l’information par ce flyer (une dizaine de après son lancement le 12).
    Par contre j’ai bien aimé l’illustration avec les jeunes gens (très coos) et leur panneaux publicitaires. Après le “SAFE” de la ville Solidaire/apaisée/fraternelle/écologique, un nouvel acronyme de la novlangue d’Audonia : Prévention/Sérénité/Confiance/Paix/Ensemble. Le PS-CPE ?

  2. Si on remplace consommation par pollution, on peut lire que c est sans retour.
    Rien sur les causes profondes. Facile de faire avec le CAC 40, on essaye pas de changer les choses pour le plus grand nombre.
    Pensez vous que la drogue rendue légale le 1er janvier 2021, les maux societaux qui génèrent le trafic auront disparu, que le roi du Maroc changera, que les moyens de l éducation et de la justice auront doublé parceque nous aurions besoin de moyens de sécurité moindres.
    Kb est le soutien sinon l enfant idéologique de Valls. Ses pseudo démarches démocratiques montrent bien qu’ il veut seul décider. Le prétexte anti JR puis WD ne tiendra plus longtemps, notamment avec les locataires de la Semiso et les demandeurs de logement.
    Id stg se perd, croyant sans doute obtenir une place d’observateur autorisé ds la nouvelle majorité

    • @ Taquet

      Mon cher Colonel,

      Nous avons déjà une place d’observateur “avisé” que l’on nous autorise ou pas.
      L’absence de complaisance, n’est pas incompatible avec un minimum de dialogue si cela est possible.

      EPS

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